Biens de consommation
Internet
Les services et biens de consommation sont considérés ici comme la variable d’ajustement. Une fois pris en compte les émissions de GES nécessaires à maintenir des conditions de vie décentes sur les besoins fondamentaux : s’alimenter, se loger, se déplacer, le reste à émettre est à répartir entre les différents postes de consommation et les différents services, publics et privés.
Se pose alors ici une question importante : quels services ou quels biens sont à privilégier ? Nous avons dans les lignes précédentes pris le parti de conserver deux secteurs : la construction / rénovation de bâtiments et la construction de véhicules.
Pour le reste, en grande masse, la répartition des émissions actuelles est la suivante :
Rappelons à ce stade que le reste à émettre, du fait des hypothèses définies au début, correspond à 61 Mt CO2e, soit moins que ce qui est actuellement émis du fait des seuls services publics.
A supposer que nous fassions des efforts importants en termes d’efficacité énergétique et de décarbonisation du mix énergétique mondial, nous pourrions réduire d’un tiers les émissions de GES à service équivalent, soit environ 150 Mt CO2e. Ce chiffre est encore 2,5 fois trop élevé. Il est donc nécessaire d’agir sur une diminution des services publics et du pouvoir d’achat ou du moins de la quantité de biens consommés.
NB : La multitude des services et biens concernés rend difficile l’analyse en coût carbone et ne permet pas d’aboutir à un exercice de comptabilité comme pour les secteurs précédents, d’autant plus que très peu de données sont accessibles au niveau des services publics. Par ailleurs, si nous pensons pouvoir apporter des éléments pertinents sur les mesures permettant de réduire les émissions de GES de différents secteurs comme le résidentiel, le transport ou l’agriculture, c’est que nous sommes confrontés régulièrement, dans le cadre des PCAET (voir http://bl-evolution.com/nos_prestations/climat/plan-climat-air-energie-territorial/) que nous accompagnons, à ce genre d’exercice et nous en maîtrisons les ordres de grandeur. En revanche, sans données précises en matière de comptabilité carbone il nous est plus difficile d’estimer l’impact de tel ou tel mesure de réduction ou d’optimisation dans les services.
Il apparaît ainsi difficile de maintenir dans le même temps des soins de santé de qualité, la possibilité d’utiliser du matériel médical complexe, l’ensemble des soins apportés aux personnes dépendantes… avec un système éducatif portant la grande majorité des élèves à un niveau baccalauréat, la possibilité de faire des études pointues, du matériel de recherche performant… avec la rénovation des infrastructures, le maintien voire le développement d’un réseau ferré, la construction de pistes cyclables et le maintien d’une voirie non dégradée… avec les services culturels, des installations sportives de qualités… avec l’ensemble des fonctions régaliennes, une justice fonctionnelle, un service de sécurité intérieure comme extérieure… avec le maintien de services bancaires, assurantiels et le maintien d’activités économiques hors-sols… avec la consommation de vêtements neufs tous les ans, le remplacement de son smartphone tous les deux ans, de son PC tous les 3 ou 4 ans et en consommant tout un tas de gadgets connectés.
Au vu des ordres de grandeurs cités dans le tableau précédent, une conclusion qui semble s’imposer est que la numérisation de nos modes de vie est incompatible avec une trajectoire de 1,5°C. Vouloir rester sur cette trajectoire, conduit donc à engager rapidement une dénumérisation de nos modes de vie, ou a minima un travail drastique visant la sobriété numérique.
Une autre conclusion est qu’il est impossible de maintenir notre capacité à se procurer des biens courants et en particulier des vêtements de la même manière qu’actuellement.
Concernant les données mobiles, un smartphone nécessite d’émettre entre 40 et 60 kg CO2e en moyenne, mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Bien souvent, on oublie que pour que ces derniers fonctionnent, il faut un réseau performant et des infrastructures de stockage de données. En première approximation, on peut répartir les émissions de la communication (que ce soit téléphonique ou via internet) en trois parts plus ou moins égales : la fabrication des terminaux (smartphone, ordinateurs…), l’infrastructure de réseaux (antennes relais, câbles, routeurs…) et l’infrastructure de stockage (centre de données).
Diviser par quatre les émissions du numérique ne se fait donc pas simplement en conservant 8 ans au lieu de 2 ans son smartphone, mais doit passer par une sobriété dans la consommation de données (en diminuant de manière importante la consommation de vidéo) et dans la création de nouvelles infrastructures.
Le tableau suivant est un exemple de bloc de mesures types permettant, en les appliquant toutes, de réduire suffisamment nos émissions de GES pour s’inscrire dans une trajectoire compatible avec l’objectif de 1,5°C pour le secteur du numérique.
Limitation du nombre d’équipements en service à un instant donné.
Normalisation de la location plutôt que la vente de terminaux mobiles ou fixes. Augmentation de la durée de vie minimale des terminaux à 4 ans pour un smartphone, 8 ans pour un ordinateur portable et 12 ans pour un écran.
Commentaire : L’ensemble de ces mesures vise à réduire la fabrication de nouveaux appareils. En rendant le constructeur responsable de l’allongement de la durée de vie des terminaux, celui-ci doit les rendre plus durables et le marché doit s’orienter pour favoriser l’échange de matériel d’occasion.
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
- Création d’espaces communs dans chaque quartier pour partager la consommation audiovisuelle.
- Taxe forte sur la consommation Internet à partir d’un seuil (limiter les gros consommateurs).
-Favoriser la Recherche & Développement sur la « résistance programmée » (en opposé à l’obsolescence programmée).
- Réseaux d’échange de produits (économie circulaire).
Interdiction à la vente de téléviseur de plus de 40 pouces.
Commentaire : Les émissions de GES liées à la production de téléviseurs sont
directement proportionnelles à la taille de l’écran.
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
-A compléter
Construction d’un unique réseau 5G.
Commentaire : 4 opérateurs principaux en France construisent 4 réseaux différents pour chaque génération. Un unique réseau diminuerait significativement l’infrastructure tout en augmentant la couverture.
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
-A compléter
Interdiction des publicités en ligne intégrés aux sites internet
Commentaire : Les flux de données publicitaires représentent une part significative et à l’utilité discutable des sites internet. Les retirer permettrait de réduire d’autant les flux de données.
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
-A compléter
Le flux vidéo consommé doit être divisé par 3 d’ici 2030.
Commentaire : Le flux vidéo est le principal contributeur au trafic et augmente de 20% par an. En régime tendanciel, il devrait donc être multiplié par 4 en 2030, il faut prendre le chemin inverse. Cela passe par une diminution du temps passé par individu à regarder des vidéos, à une stagnation de la qualité et une meilleure efficacité énergétique.
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
-A compléter
Chaque individu en France achète 10 kg de vêtements neufs par an, soit 40 pièces par personne et par an et presque autant de seconde main. Nous pourrions raisonnablement vivre sans soucis vestimentaires pour les 10 prochaines années sans mise sur le marché de nouveaux vêtements et simplement en réutilisant les matières existantes. Ce secteur est emblématique des enjeux actuels : l’utilisation d’une quantité abondante de matières premières créant des tensions sur les ressources en eau, une confection délocalisée, fortement émettrice de GES du fait du mix énergétique des pays de production, des transports de plus en plus par voie aérienne, une obsolescence d’usage de plus en plus rapide, un très faible recyclage des matières…
La fast-fashion est donc incompatible avec une trajectoire tendant vers les 1,5°C de réchauffement climatique.
Le tableau suivant est un exemple de bloc de mesures types permettant, en les appliquant toutes, de réduire suffisamment nos émissions de GES pour s’inscrire dans une trajectoire compatible avec l’objectif de 1,5°C pour le secteur des transports en avion.
Relocalisation d’une partie de la production.
Commentaire : Une production plus locale évite des émissions de GES liées au transport et au mix énergétique carboné des pays actuels
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
-A compléter
Développement de l’artisanat de confection / retouche de vêtements.
Commentaire : Cela doit permettre d’augmenter la durée de vie moyenne d’un vêtement de 1 à 4 ans.
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
-A compléter
Limitation à 1kg de vêtements neufs mis sur le marché par an et par personne dès 2022.
*Commentaire : Sans *
Proposition d’Alternatiba Le Mans pour le PCAEED Sarthois
Les différentes mesures proposées visent à réduire respectivement par 4 et par 8 les émissions associées au secteur du numérique et du textile. Concernant les autres biens de consommations, les grandes notions comme l’économie circulaire, le réemploi, l’arrêt de l’obsolescence programmée et le retour à une consommation raisonnée ne sont pas des possibilités mais bien des prérequis nécessaires, sans pour autant être suffisants.
Un travail de relocalisation bien sûr, mais aussi de réorientation vers les secteurs les moins intensifs en carbone est également nécessaire. Derrière ces grands mots et ces grandes notions se cache le fait qu’une part significative de l’emploi doit être réorientée, qu’il faut des personnes qui réparent, qui fabriquent, qu’il faut savoir faire avec la ressource présente sur le territoire et que l’emploi de bureau ne sera plus un standard de vie.
Avec l’ensemble de ces mesures, nous pourrions réduire de 120 Mt CO2e à environ 25 Mt CO2e les émissions de GES liées aux biens de consommation, ce qui laisse un peu plus de 35 Mt CO2e pour l’ensemble des services publics et privés et confirme l’impossibilité de maintenir à l’identique ces services.
Par exemple, maintenir un ensemble de soins pour tous, un système de santé qui permette à la majorité d’être en bonne santé ne semble pas compatible avec le maintien d’une technologie sophistiquée, coûteuse en énergie et en ressources, permettant la résolution de maladies plus rares, même en se mettant à privilégier un système basé sur la prévention (alimentation, activité physique…) plutôt que sur les soins curatifs…
De la même manière, une éducation complète pour tous, n’est peut-être pas compatible avec le maintien des grands équipements de recherche. En tout état de cause, une trajectoire pour rester sous les 1,5°C de réchauffement climatique nécessite de diviser par 3 les émissions de GES liées aux différents services, publics ou privés. Si une meilleure efficacité énergétique peut sans doute contribuer à un tiers de l’effort nécessaire, les deux autres tiers devront se faire par des mesures de sobriété et de suppression de certains services.